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5 juillet 2010 1 05 /07 /juillet /2010 22:54

 

 

 

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Est-il encore utile de faire les présentations ? (Par tous les dieux, quel manque de romantisme) Le principe est simple, et si vous ne l'avez pas encore compris vous le comprendrez dans les secondes qui vont suivre en voyant le contenu de cet article. C'est en fait un simple retour sur une année, ici 1996, qu'il faut voir comme un prétexte pour se souvenir de grands films parfois un peu oubliés. Alors bien sûr rien d'objectif dans tout cela : je ne cherche pas à faire en sorte que tout le monde s'y retrouve car, avec ce genre de Top démarche, personne ne s'y reconnaît jamais. Bref, je n'en dis pas plus et vous laisse, en espérant que la connexion se fasse entre vous et ce listing, afin que vous puissiez y faire des découvertes ou des redécouvertes.

 

 

Top 10

 

 

Collection AlloCiné / www.collectionchristophel.fr 1.  L'armée des douze singes

 

Il m'arrive régulièrement de dire, quand il s'agit d'exprimer la façon de percevoir et d'apprécier le cinéma, que le sujet traité par un film au final m'importe bien peu. D'ailleurs j'aime assez cette formule assez simple : « Ce qui fait la force d'une histoire, ce n'est pas ce qu'elle raconte, mais la façon dont elle est racontée. » Pourquoi commencer par vous dire cela pour vous parler de cette Armée des douze singes ? Eh bien c'est parce que justement c'est à ce film auquel je pense en priorité quand me vient à l'esprit cette maxime. C'est vrai qu'à se limiter à sa simple histoire à son simple sujet ils n'ont pas de quoi remuer les foules ces douze singes : « En 2030, un virus a dévasté l'humanité. Les rares survivants vivent comme des rats en cages dans des souterrains. Un homme va être choisi par des scientifiques pour remonter le temps, en 1996, l'époque à laquelle ce virus s'est diffusé, pour trouver des indices qui permettront d'anéantir la menace. » Mouif. Pas très original dit comme ça. On sentirait presque l'anticipation à deux sous, prétexte à des scènes d'actions à la Dolph Lundgren. Seulement voilà : il y a la façon de raconter. Or, c'est ce cher Terry « Brazil » Gilliam qui est aux commandes, et la démarche change alors du tout au tout.

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Alors oui, je sais ce que l'on dit de Terry Gilliam de nos jours, surtout au regard de ses derniers films pas forcément fameux. Malgré tout il reste le Terry des Monty Python, et surtout celui de Brazil. Terry Gilliam, c'est l'art de manier l'humour noir, c'est la capacité à créer un univers fort de sa folie malsaine qui fait sourire autant qu'il met quelque peu mal à l'aise, tant celui-ci semble éloigné et proche de nous en même temps. Ce regard sur le monde des Humains, il est présent dans cette Armée des douze singes. Beaucoup moins rigolard que Brazil, beaucoup moins gentiment zinzin, ce film est au contraire terriblement noir et sombre dans une folie des plus inconfortables. On se moquerait presque du virus, ce qui compte c'est ce regard nouveau que permet le film sur notre époque contemporaine. Observé du point de vue du héros James Cole, interprété par un Bruce Willis remarquable de sobriété, notre banal quotidien se transforme en monde insouciant face à l'extinction à venir. On redécouvre le plaisir de l'air, la beauté de la musique, la jouissance de la liberté. Mais on ressent aussi d'autant mieux cette folie qui nous habite, que l'on cache dans un coin parce qu'elle nous gène, mais aussi ce chaos qui nous entoure et qu'on ignore car l'idée nous effraie trop pour qu'on le regarde en face. L'armée des douze singes, c'est finalement une uvre qui sait donner tout son sens au mot insouciance. Il traduit à la fois la beauté de cette état d'esprit un peu naïf, mais aussi l'incroyable stupidité à vouloir refuser de voir la vérité des choses parce qu'elle est désagréable. Parmi les choses que j'aime exprimer au sujet du cinéma, en plus de la phrase que je viens d'évoquer plus haut, c'est aussi l'idée selon laquelle on va voir des films pour ressortir différent de comme on est entré. L'armée des douze singes fait, pour moi, incontestablement partie de ce genre de films.

 

 

Warner Bros.2. Heat

 

J'ai lu une fois, au sujet de Michael Mann (le réalisateur de ce Heat), qu'il était l'auteur d'un genre de films un peu iconoclaste et à part : celui des « blockbusters d'auteur ». Alors, certes, je suppose que l'auteur de cette phrase n'entendait pas le mot blockbuster au sens littéral du terme, mais comme simple synonyme de « cinéma à grand spectacle », mais malgré tout, je trouve que cette terminologie touche à quelque chose de vrai. C'est vrai que la force de ce cher Michael, c'est finalement de se frotter à un type de film totalement éculé, et de prendre le parti pris de sortir des codes du genre, de sortir de cette logique du « grand spectacle » à tout prix, pour lui préférer une démarche de contemplation et d'imprégnation. Attention ! Cela ne veut pas dire tourner un sujet Hollywood de façon « réaliste » à la sauce Dardenne, car il y a toujours dans les intrigues et les personnages de Mann un aspect idéalisé et surfait, qui donne à ses films une dimension fantasmatique qui lui est assez propre. A mes yeux, Heat correspond parfaitement à cette vision des choses. Al Pacino et Robert de Niro n'incarnent pas des personnages de tous les jours, ils ne sont pas vus au travers d'un quotidien désacralisateur, au contraire. Le caractère iconographique de ces personnages est renforcé, valorisé, et c'est d'ailleurs justement en cela que ce face-à-face entre deux des grandes figures du cinéma démonstratif et artificiel américain prend toute sa dimension.

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Souvent est-il vendu ainsi, ce Heat : c'est un bon petit polar, un flic contre un voyou, mais ce qui fait qu'il se distingue des autres c'est son opposition Pacino/de Niro. Quelle réduction de limiter ce film à cela. Heat, c'est aussi et avant toute chose un remarquable travail d'esthète pour retransformer la réalité et même retransformer la fiction. Une banale histoire de casse de banque se transforme ici en une très longue et très minutieuse aventure dans laquelle la caméra de Mann s'attarde sur ce qu'on passe d'habitude sous silence. On voit recruter, on voit commander le matériel, dégoter l'affaire Mais surtout on s'attarde sur des Hommes, sur des valeurs et des styles de vie. Ici il n'y a pas de gentils ni de méchants, de flics ni de voyous. Heat, c'est l'opposition entre les hommes ordinaires et les hommes d'exception. Mais ici, l'exception n'est pas forcément à entendre dans le sens de « grand homme », mais plutôt dans le sens de ceux qui abandonnent les plaisirs du quotidien pour le grisement de mener sa tâche dans le souci du détail et de la perfection. Ainsi le théâtre de Mann, à miser plus sur les hommes que sur l'action, nous surprend d'autant mieux et d'autant plus quand cette action prend les devants subitement et brièvement, mais avec une intensité et une force qui saisissent jusqu'à l'échine. Des fois on serait tenté de ne retenir de ce film que cette fameuse scène de fusillade dont toute personne qui a vu Heat vous parle forcément, mais c'est parfois oublier que ce moment d'extase n'est que l'apothéose d'un travail de fond murement mené, sorte de plaidoyer aux longs préliminaires pour tout chasseur de l'orgasme ultime. Alors face à ce type de spectacle, moi je dis oui, oui, et même trois fois oui tant une pareille démarche parfois à la fois à transcender le récit qu'à démontrer que le plaisir peut se construire même à partir des choses les plus basiques

 

 

69199329_af.jpg3.  Fargo

 

On les cite souvent mais c'est tellement vrai, les frères Coen font indéniablement partie des auteurs contemporains qui témoignent encore d'une remarquable richesse d'expression dans la filmographie qu'ils se construisent (et il faut que je dise cela l'année où ils nous ont pondu ce Serious Man bien fade) C'est qu'entre un No Country for old men et d'autres Big Lebowski, on se rend parfaitement compte de l'ampleur du talent des deux frères, qu'il s'agisse du drame bien noir pour l'un que de la comédie bien déjantée pour l'autre. Mais, à bien y réfléchir, les films des frères Coen se composent sans cesse des mêmes ingrédients, c'est juste qu'ils ne sont pas dosés pareil. D'un côté on retrouve toujours cet humour tendrement acide pour les personnes ordinaires (pour ne pas dire insignifiantes), et de l'autre ne se trouve jamais loin le drame noir, d'autant plus cruel qu'il semble dénué de sens ou de logique. Ainsi, ce Fargo est peut-être l'un des plus fameux représentants de cette alchimie là. Des personnages stupides et risibles on en a, une situation absurde aussi L'émotion finale, elle aussi elle est là

 

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Fargo glace d'autant plus le sang que les Coen on su marier les confrontations : le chaud et le froid, le sucré et le salé, la comédie et la tragédie. Cette petite ville de Fresno, ses ploucs qui l'habitent, et son colosse de bucheron le long de la route prêtent forcément à la dérision et la blague facile. Mais ces violons lancinants et dépressifs nous rappelle à quel point le chemin entre la bonhomie et la tragédie est court. On ne manque d'ailleurs pas de se rappeler que ce film est adapté d'une histoire vraie, ce qui fait d'autant plus grincer des dents. Une famille, un gars raté et potache, et une histoire d'enlèvement qui tourne à la débâcle, voilà le programme offert par ce Fargo. Mais il faut me mettre à l'idée que le pauvre raté est ce bon vieux William H. Macy qui donne ici toute la dimension à cette histoire tant il parvient à faire naître chez nous ce mélange ambiguë de pitié et de dégoût, de sympathie et de haine, que transmet cette situation. Comme souvent avec les Coen, on ressort de ce film le bec cloué. Une fois de plus, tout aura été dit. Bref, autant se taire alors et vous laisser découvrir par vous même ce qui est pour moi un véritable chef d'uvre de cinéma

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18455052.jpg4. Créatures célestes 

 

Ceux qui ont déjà quelque peu arpenté ce blog connaissent mon indifférence polie pour la saga du Seigneur des Anneaux, réalisé par notre cher néo-zélandais de réalisateur : Peter Jackson. De même, j'avais témoigné d'un enthousiasme plus que modéré pour le fameux King Kong qui emporta malgré tout tant l'adhésion. Pourtant, aussi paradoxal que cela puisse paraître, je me considère comme un grand adorateur de l'ami Jackson. Disons seulement que je suis bien plus réceptif aux univers développés dans ses premiers films. Alors, bien sûr, parler des premiers films de Jackson évoque forcément à nos bons souvenirs ses gaudrioleries gores que furent Bad Taste et Brain Dead, mais c'est aussi des films très intimistes et très puissants comme ce Créatures célestes, troisième uvre du réalisateur, mais aussi première apparition de Kate Winslet dans un film de premier ordre. C'est vrai que pour ceux qui résument Jackson au Seigneur des Anneaux et à King Kong, il est difficile de l'imaginer accomplir des uvres aussi crues et aussi entières, lui qui s'est surtout rendu connu du grand public pour ses univers formatés et sa réalisation conventionnelle. Et pourtant c'est le cas avec ce Créatures célestes, qui est pour moi et de loin son film le plus beau et le plus intense.

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Histoire de deux jeunes filles qui se complaisent dans leur amitié et dans leur univers imaginaire afin de mieux fuir leur société rongée par la morale, Créatures célestes mérite surtout le déplacement pour la façon dont est traité un tel sujet qui, par bien des aspects, aurait pu paraître lourd et pompeux. Jackson, au moment de réaliser ce film, restait sur ses deux goreries assumées, ce qui fait que passer à ce film est un véritable tournant. Malgré tout, il ne rompt pas en totalité avec son style, et conserve une réalisation très nerveuse, viscérale, notamment au travers d'une scène de repas qui est un véritable clin d'il à sa filmographie. Créatures célestes en devient un film d'une incroyable violence latente, enfouie, prête à exploser, et qui trouve son exutoire au travers d'échappées fantastiques qui viennent écorcher ce monde de bonnes valeurs à vif. Ce film est pour moi d'une audace incroyable ; on est jamais vraiment dans les sentiers battus, si bien que cette intrigue n'en est que plus transcendée. Pas de doute à mes yeux, c'est de loin le film le plus abouti de Jackson, car celui-ci a eu le grand mérite de susciter chez moi un réel frisson émotionnel.

 

 

19127267.jpg5. Casino

 

Si des grands fans du maître Scorsese tombaient un jour sur cet article, ils  hurleraient sûrement de constater la modique cinquième place de ce Casino qui, à leur yeux, ne peut certainement mériter que la plus haute de toutes les marches de tous les classements. J'avoue, j'avoue Je ne suis pas le dernier à être sensible à la démesure du style de grand Martin, et ce Casino fait indéniablement partie de ces films qui me procurent le grand frisson. Mais qu'on se dise la chose de cette façon suivante : le fait que je dispose ce film en 5e position ne veut pas dire que mon affection pour ce film est moindre, mais disons qu'elle vous renseigne surtout sur le niveau d'affection que j'entretiens pour les quatre films précités, car oui et trois fois oui cela ne m'empêche pas d'adorer Casino.

Robert De Niro et Don Rickles. United International Pictures (UIP) Robert De Niro et Sharon Stone. United International Pictures (UIP) Joe Pesci et Robert De Niro. United International Pictures (UIP)

La belle Roxanne serait présente qu'elle nous dirait que « c'est un peu court jeune homme » pour nous gratifier les mérites d'un tel film, et elle aurait bien raison. Seulement difficile de mieux parler de Casino qu'en précisant qu'il s'agit là d'un film du Martin Scorsese des grands jours. Cela implique des acteurs d'une classe explosive et énergique : Robert de Niro, Joe Pesci, Sharon Stone pour ne citer qu'eux. Cela implique aussi un grand numéro de mafieux : ce coup-ci le décor est celui des casinos de Las Vegas, paradis de la corruption et de l'économie parallèle. Enfin, il y a surtout cet élément qui fait toujours recette dans les films de Martin Scorsese, c'est ce sens de tragédie faustienne qu'il sait toujours développer au mieux. On a beau être habitués, il faut bien se l'avouer, quand c'est si bien fait, cela marche toujours. En tout cas, sur moi, Casino, ça fonctionne à chaque fois, et pas qu'un peu

 

 

18834361.jpg6. Crash

 

Et revoilà David Cronenberg dans un de ses films totalement tordus ! C'est marrant, mais les films de Cronenberg sont un petit peu comme ceux de Lynch : ils nous grisent d'avance car on ne peut s'empêcher d'espérer quelque-chose « d'autre », mais il y a aussi ce frisson intérieur qui nous prend, celui du pressentiment que l'on va forcément un peu souffrir. Or, le génie de Cronenberg, c'est justement d'être en mesure de nous rassurer tout de suite. Il sait nous faire entrer progressivement dans son monde, il sait nous ménager. Seulement, il n'en oublie pas pour autant de rentrer au plus vite dans le sujet. Dix minutes suffisent pour savoir que ce film ne sera pas comme les autres.

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Ceux qui ont déjà quelque peu arpentés ce blog (décidemment je la ressors à toutes les sauces cette phrase) savent mon adoration pour l'ami Crony, et ils n'auront pas manqué de lire dans un article que je lui avais consacré toute la cohérence qui s'affiche dans sa filmographie, notamment dans cette fascination du corps qu'est la sienne. Dans Crash, le corps humain est ici étudié au travers de son nouvel appendice moderne : la voiture. Dès les premières minutes, on sent chez James Spader le sentiment de jouissance que procure cette extension artificielle de son désir de puissance. Foncer, rentrer dans le tas, détruire, froisser : c'est jouir. Alors, bien sûr, j'ai bien conscience qu'en vous le décrivant ainsi, beaucoup vont se décider à éviter poliment ce Crash car ce film leur aura semblé bien zinzin sur les bords, mais malgré tout j'assume. Je sais que les cinéphiles à la recherche d'aventures nouvelles ne pourront résister à cet énoncé énigmatique et ne pourront résister bien longtemps à l'appel du carambolage. Ceux-là, c'est sûr, ne seront pas déçus du trajet. 

 

 

19079742.jpg 7. Le tombeau des lucioles

 

Ah ça ! Ce Tombeau des lucioles, il est très facile à vendre. Découvert quand j'étais au collège, c'était alors sûrement le premier film d'animation japonais que je voyais qui ne consistait pas à s'envoyer des boules de feu dans la tronche ou bien à montrer des filles aux yeux ronds avec des jupettes trop courtes pour leurs jambes trop longues Et cette découverte eut sa conséquence : j'ai pleuré. Mais bon, j'étais jeune, influençable, surpris : tout s'explique. Arrivé à l'âge très mûr et très viril de 18-20 ans, ça y est j'étais un homme, j'avais déjà un peu tâté de cinéma et surtout de cinéma d'animation japonais, donc le résultat allait forcément être différent et pourtant j'ai pleuré. Mais bon, je vous rassure, je l'ai revu depuis, une fois mon CAPES durement et chèrement acquis, désormais responsable inflexible d'une grosse centaine d'élèves mais j'ai pleuré quand même ! Eh oui ! A chaque fois c'est la même chose, on se laisse prendre sans s'en rendre vraiment compte et au final la sobriété et la force de la démarche de Takahata est imparable. Vous voulez tester sur vous. Patience : attendez le 24 décembre ! Il y a toujours une chaîne qui a la brillante idée de le diffuser pour le Réveillon. Quelle perspicacité ! Pour faire pleurer les gamins et susciter une crise cardiaque à papy qui se rappelle au mauvais souvenir de la guerre, voilà sûrement le résultat d'un plan longuement mûri par des témoins de Jéhovah, ou des Islamistes infiltrés pour nous faire haïr Noël...

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Mais trêve de plaisanteries ! Au-delà de cette petite histoire qui, je l'espère, vous aura transmis l'envie de découvrir ce film, il me semble quand même bon de préciser que, malgré tout, ce Tombeau des lucioles n'est pas de ces films tires-larmes où on se contente de montrer des petits enfants tout tristes face aux malheurs de la guerre, et tout cela sur fond de violonneries imbuvables. Au contraire. Je trouve justement que tout le mérite de ce film est de savoir nous replonger dans le Japon de la défaite, celle de la Seconde guerre mondiale, mais en sachant rester à l'image de ces personnages, sobre et digne. C'est justement là que se trouve la force émotionnelle de ce Tombeau. Jamais les personnages ne se résignent, jamais ils ne veulent renoncer à la vie, et c'est de ce combat de tous les jours que naît progressivement à la fois l'attachement et la tristesse. Plus qu'un simple film sur la guerre, la destruction ou la mort, ce Tombeau possède au contraire l'incroyable charge émotionnelle des grandes épopées universelles : celle de la vie. Chapeau l'artiste. 

 

 

19167723.jpg 8. Dead Man

 

Ceux qui ont déjà eu l'occasion d'arpenter ce blog (et de trois ! Roh dites donc le Startouffe ! Il a des running jokes de compète pour cet article !) savent à quel point j'ai pû régurgiter le dernier film de Jim Jarmusch, l'auteur de ce Dead Man, et dont le titre était Limits of control Mais bon, c'est peut-être aussi parce que j'adore Jarmusch et son style un peu en lévitation, qu'on retrouve aussi bien dans l'adoré Ghost Dog, mais aussi dans ce merveilleux Dead Man. Je ne sais pas ce que vous en pensez de votre côté, mais je trouve que vouloir jouer autour de l'idée d'une atmosphère un peu flottante, comme le serait un nuage de fumée dans un salon d'opium, c'est un exercice très casse-gueule. Il y a un savant équilibre à trouver entre, justement cette légèreté recherchée, mais sans pour autant tomber dans l'inconsistance qui vous plombe deux heures de votre après-midi ou de votre soirée.  Or, vous l'avez compris, je trouve que Dead Man est de ces films qui savent trouver cet équilibre.

Johnny Depp. Collection Christophe L. Johnny Depp. Collection Christophe L.

Quelque peu perdu dans l'Ouest pour de basses besognes notariales, notre charmant héros, incarné par un Johnny Depp une fois de plus très propret, va se retrouvé emmener dans une autre conquête de l'Ouest, une conquête de l'Ouest à l'envers. C'est cela que j'aime beaucoup dans ce Dead Man : on sort de cette logique du héros cow-boy qui part à la conquête des terres gorgées d'or (et accessoirement d'indigènes) de l'Ouest américain. On sort d'ailleurs aussi de cette logique du film d'action traditionnelle ; de cette idée du « bang-boum-yeah » où le héros est forcément vénéré pour sa capacité à s'imposer, à conquérir, et à embrasser la fille à la fin sur fond de soleil couchant. Dans Dead Man, c'est l'Ouest qui envahit le héros, qui revisite son nom, son histoire, qui lui impose sa philosophie et son art de vivre. Mais attention : rien à voir avec un gentillet Danse avec les loups ! Ici l'immersion est clairement initiatique, déroutante, mais ô combien séduisante. Nul doute, si ce Dead Man a bien un intérêt et une force émotionnelle, c'est dans sa capacité à nous bercer dans ce monde si étranger du nôtre, si bizarre et par bien des points totalement déglinguées  mais tellement séduisant.

 

 

18647437.jpg9. Los Angeles 2013

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Eh oui il était encore là l'ami Carpenter durant cette année 1996, et pas avec le moindre de ses films, puisque ce Los Angeles 2013 n'est ni plus ni moins que la nouvelle aventure du légendaire Snake Plisken qui fit la gloire du grand Kurt Russell ! Kurt qui ? Ah les ignorants ! Mais le grand Kurt Russell ! Celui qui se fit connaître essentiellement pour son rôle magistral dans New-York 1997, déjà de John Carpenter ! « Oulà ! Se disent déjà certains, entre Los Angeles 2013 et New-York 1997, il a pas l'air de se fouler dans les titres et dans les histoires papy Carpenter : ça sent le gros nanar à plein nez tour ça Alors oui, c'est vrai, vous n'auriez pas totalement tort en cataloguant ce Escape Los Angeles (puisque c'est son titre original) dans la catégorie des séries Z Mais c'est toujours plus ou moins le cas avec ce cher Johnny et, avouons-le, il sait en jouer le bougre pour notre plus grand plaisir. Mais là, on touche quand même quelque chose de fort avec ce film, car non seulement il s'inscrit dans un genre très codifié proche du ringard, mais et c'est là que l'histoire est quand même fameuse c'est ce Los Angeles 2013 se permet de parodier son prédécesseur, New-York 1997, en en reprenant exactement la même histoire !

Kurt Russell. United International Pictures (UIP) Kurt Russell et Stacy Keach. United International Pictures (UIP) Pam Grier. United International Pictures (UIP)

« Rah l'arnaque » diront certains ! En fait il s'agit plus d'un remarquable pied de nez. En effet, Los Angeles 2013 est plus ou moins un film de commande de la part d'Universal qui avait demandé à John Carpenter de refaire un film à la New-York 1997 « Ils veulent la même chose ? Ils auront la même chose ! » s'est sûrement dit l'ami Carpenter. Et voilà qu'il reprend toute l'intrigue au pied de la lettre, changeant quelques détails. Dans l'original, New-York était devenue une ville coupée du monde transformée en prison, mais dans laquelle s'était crashé le président des Etats-Unis, raison pour laquelle on a envoyé une barbouze récalcitrante pour sauver l'homme le plus puissant du monde. Pour ce film-ci, c'est Los Angeles qui sert de ville prison, c'est la fille du président qu'il faut sauver, mais sinon toutes les cartes restent les mêmes. Cela relève presque du remake ! Seulement rassurez-vous ! Le bon vieux John ne se moque pas du spectateur par une telle démarche. Le film est toujours aussi barré, qui plus est habité de personnages encore plus frappés que les précédents : Steve Buscemi et Pam Grier viennent ici appuyer ce bon vieux Snake, et cela dans un état d'esprit clairement ouvert à l'autodérision. Mais là où les films de Carpenter prennent tout leur intérêt, c'est que la caricature ne se limite pas qu'à un genre cinématographique (le cinéma qui se limite à regarder le cinéma, je déteste !) car ici, c'est toute la société de la côte ouest qui en prend un coup, et la morale puritaine aussi Ainsi, ne pas avoir vu « l'original » ne nuit pas au plaisir de la découverte, mais forcément le plaisir ne peut qu'être décuplé lorsque s'opère la comparaison. Il n'y a pas à dire, il n'y a que ce cher John Carpenter pour nous faire des coups pareils et, personnellement, moi j'en redemande encore !

 

 

18719483.jpg10. Planète hurlante

 

Pour finir, c'est sûr, on pourra trouver à redire dans le choix de cette Planète Hurlante tant ce film a des allures de SF bas de gamme tournée avec les moyens d'un téléfilm. Mais bon, cela fait aussi partie de son charme. (C'est d'ailleurs l'occasion de faire un jeu avec des potes : repérer les effets spéciaux les plus miteux. Mon préféré c'est la jumelle sur rail qui émet un bruit de moteur laissant supposer qu'elle est super-moderne alors qu'en fait faut quand même se la tirer avec les deux bras pour qu'elle nous arrive devant les yeux Ah ! ça c'est l'avenir !) Malgré tout, trêve de plaisanteries, s'il est vrai qu'on grimacera quelque peu lors des vingt premières minutes (voire la première demi-heure), le charme minimaliste de ce film ainsi que le talent d'écriture de l'uvre originale de Philip K. Dick dont c'est ici l'adaptation (une de plus !) savent quand même faire leur effet et le charme parvient malgré tout à faire effet.

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Le secret ? Comme beaucoup de films adaptés du grand Philip, il est dans ce propos qui suit l'intrigue et qui, une fois de plus, amène à nous questionner sur la nature de l'humain et de la vie. Face à une telle histoire, et avec un budget aussi limité, le talent du canadien Christian Duguay a été de faire sobre, de tout miser sur l'atmosphère d'oppression et d'isolement de ce monde minéral plutôt que de s'enfermer dans un sensationnalisme bon marché. Alors oui, des fois on grimace face aux effets spéciaux, mais au final le film vieillit bien quand même, comme un vieil incontournable des années 80. Les aficionados sauront apprécier ce film comme il se doit

 

 

 

Mais aussi...

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19255613.jpg Strange Days

L'ami JW m'étripera vivant de ne voir ce Strange Days en dehors du palmarès. Mais bon, il est là, je le cite, et vous invite donc forcément à y jeter un coup d'il si l'occasion se présente. C'est donc un moindre mal de ne le faire figurer qu'ici. Après, il est vrai, cela peut paraître peu valorisant étant données les remarquables qualité et intensité du spectacle mené ici de main de maître par Kathryn Bigelow. On est tout de suite pris à la gorge par cette atmosphère presque crépusculaire, par cette intrigue halletante, par cette nervosité jouissive. Bref, c'est vrai que je ne me suis pas ennuyé une seconde (pourtant certains savent qu'il m'en faut peu maintenant) et qu'au final j'ai clairement pris mon pied tout du long, notamment avec un final décoiffant, achevant ainsi un film vécu comme une véritable bouffée d'adrénaline.

 

19255605.jpg Se7en

C'est LE premier coup d'éclat de David Fincher après un Alien 3 qui n'avait pas convaincu tout le monde (et je n'en dis pas plus pour ne pas rouvrir le débat). Or, un peu dans la lignée de Fight Club qui suivra deux ans plus tard, ce Se7en relève du grand film démonstratif, plein d'effets de réalisation et riche d'une histoire et d'un sujet qui entend en foutre plein la gueule. Et vas-y que je te mets un grand serial killer charismatique, et vas-y que je te mène une grande enquête avec un gros twist final qui te prend aux tripes, et surtout vas-y que je t'envoie le casting qui déglingue : Pitt, Freeman, Paltrow et Kevin Spacey qui venait alors de percer. D'aucuns diront que c'est là la jeunesse de Fincher, et que ce style ostentatoire manque de subtilité, surtout par rapport aux uvres du maître qui suivront par la suite. Mais bon Je trouve une telle approche quand même bien sévère et très tatillonne. Oui, Fincher a voulu nous en donner à max quitte à en faire déborder l'assiette : et alors ? Comment reprocher à un artiste une telle générosité, surtout quand c'est efficace ?

 

19253433.jpg Trainspotting

Maintenant Danny Boyle s'est fait un nom avec Slumdog Millionaire. En 1996 il sortait seulement son deuxième long-métrage ce Trainspotting après un Petits meurtres entre amis qui avait fait parlé de lui pour son style inventif et son ton grinçant. Ici, Danny Boyle reprend une formule qui marche : des jeunes un peu trashs, de la musique qui déboîte, un style un peu rentre dedans. Un peu moins réussi que ses meilleurs films mais un film qui n'en reste pas moins très efficace, inventif et qui ne laisse pas indifférent. Encore aujourd'hui, il est considéré comme cultes par quelques représentants d'une certaine génération.

 

http://images.allocine.fr/r_160_214/b_1_cfd7e1/medias/nmedia/18/63/28/52/19779719.jpg Bound

On en dit du mal des frères Wachowski depuis leur saga Matrix très discutable. On dit qu'ils ne jouent que sur les effets spéciaux, qu'ils oublient à chacun de leurs films de raconter une histoire pendant qu'ils se laissent aller dans des trips psychédéliques dans lesquels ils sont les seuls à s'y retrouver vraiment, mis à part ceux qui sont ceintrés comme eux. A ceux là, je leur dit : voyez Bound. Huis-clos minimaliste, mais diablement efficace, on a du mal à se dire que ce sont deux tâcherons qui ont réalisé un film aussi efficace et maîtrisé. Pour ma part, c'est un véritable coup de cur.

 

18463464.jpg Nixon

Avant toutes les bouses dans lesquelles il a perdu toute sa gouaille et son style piquant, Oliver Stone réalisait encore des films percutant et réfléchi. 1996, faisait encore partie de sa bonne période. Certes, tout le monde attendait un JFK bis d'où beaucoup de déceptions. Effectivement, Nixon n'est pas Kennedy : Oh ! La découverte ! Il n'en reste pas moins une lecture très réfléchie d'une période, d'un pays, d'un homme. Une uvre certes moins enlevée et riche en émotion que JFK, mais un film audacieux et très plaisant à sa façon.

 

Collection Christophe L. Chacun cherche son chat

J'aurais pu citer du même auteur son Air de famille, sorti la même année, mais faute de place (et surtout parce que j'ai un petit faible supplémentaire pour ce film en particulier) je préfère mettre en avant ce Chacun cherche son chat. Ici, ce cher Klapisch nous peint en effet un film plus léger, dans lequel l'intrigue semble s'écrire au fil de la plume, au gré des péripéties de cette pauvre Chloé qui cherche son chat. C'est bien sûr l'occasion de construire un petit microcosme charmant dans lequel le talent du sympathique Cédric fait sur moi toujours son effet

 

rock.jpg Rock

Changement de registre avec l'un des premiers longs métrages de celui qu'aujourd'hui beaucoup aiment détester : j'ai nommé Michael Bay. Mais bon, très cliché certes, mais il faut quand même bien avouer que ce Rock est diablement efficace. Cherry on the cake, la confrontation de deux monstres du cinéma qui jouent parfaitement le jeu de cette évasion/invasion d'Alcatraz : Sean Connery d'un côté en vieil espion de sa majesté (tiens donc, cela vous rappelle quelque chose ?) et Ed Harris, en général terroriste dont les valeurs se retrouvent en porte-à-faux. Pour moi, il s'agit là d'un des grands symboles des films d'action des années 1990

 

18863006.jpg Mission : Impossible

Toujours dans l'action, mais ce coup-ci de manière bien plus feutrée, ce Mission : Impossible de Brian de Palma. J'avoue toujours être surpris par ce film qui navigue un peu dans toutes les eaux, inaugurant l'esprit Bourne avant l'heure, mais s'essayant tout de même à répondre au cahier des charges du blockbuster. Le casting très européen (Reno, Béart, Scott-Thomas) surprend d'autant plus et sait dénoter par rapport aux spectacles plus fades qui succéderont ensuite pour compléter la saga

 

19076744.jpg Une nuit en enfer

Comment ne pas finir avec ce joyau de Robert Rodriguez qui, d'ailleurs, figurerait sûrement dans le top 10 si celui-ci n'était pas déjà autant chargé de chefs d'uvre. Belle série B assumée à base de désoudage de vampires, le film se démarque aussi et surtout grâce à un casting 4 étoiles : Clooney, Tarantino, Keitel, Hayek. Une drôle de brochette pour un spectacle brûlant de plaisir Rien de mieux pour conclure cette revue de 1996

 


 

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